samedi 19 février 2022

Edward Said

Edward Saïd était un idéologue médiocre qui ne connaissait pas grand chose du Moyen-Orient. C'est un spécialiste de la littérature anglaise. Bien qu'il parlait le dialecte arabe palestinien de sa famille, il n'a jamais maîtrisé l'arabe formel et en raison de l'héritage chrétien de sa famille (ainsi du fait que sa famille était riche et pas du tout représentatif de l'Arabe moyen), il connaissait assez mal l'islam et la mentalité dominante de la région.

Son livre contenait de nombreuses affirmations délirantes comme le fait que les portugais avaient colonisé le Japon mais en plus, sa thèse principale est fausse. Robert Irwin un universitaire d'extrême gauche, converti à l'islam, a écrit un livre entier pour détruire Saïd: Dangerous Knowledge: Orientalism and Its Discontents  Irwin montre que nombre des «orientalistes» qu'il a examinés dans son livre n'étaient pas des serviteurs de l'impérialisme occidental mais plutôt ses opposants et que beaucoup d'entre eux traitaient la culture de l'islam avec respect. L'étude de l'islam était dominée au XIXe siècle par les « orientalistes » allemands - qui n'étaient associés à aucun projet impérial au Moyen-Orient. (En réalité, l'islam tel pratiqué aujourd'hui a été grandement influencé par ces orientalistes allemands: https://threadreaderapp.com/thread/1481656842853904389.html Mais c'est un autre sujet). 

La défense des partisans de Saïd (je pense à l'historienne Maya Jessoff) peut se résumer comme cela: certes, Saïd s'est trompé sur de nombreux faits mais de nombreux théoriciens importants se sont trompés sur tels ou tels faits. L'essentiel est précisément la discussion que Saïd a provoquée. Le problème c'est que non seulement Saïd racontait n'importe quoi d'un point de vue des faits mais d'un point de vue théorique, c'est encore pire. Sa " théorie" contient de nombreux problèmes: le premier problème est la tendance de Saïd à voir toute déclaration critique sur «l'autre» comme raciste sans savoir si elle a ou non un fondement. Dans les vingt premières pages, la tendance est déjà claire. Saïd cite des déclarations "racistes", par exemple la déclaration du commissaire britannique en Egypte, Lord Cromer, selon laquelle les Egyptiens sont caractérisés par un manque de sincérité lorsqu'ils négocient avec les autorités. Said ne prend pas la peine de vérifier dans quelle mesure ces déclarations reflètent une réalité égyptienne. Que s'est-il même passé en Egypte à cette époque? Quelles étaient les relations des Egyptiens avec les autorités britanniques? L'Égypte était-elle intéressée à avoir une relation honnête avec ses dirigeants britanniques? Il est clair que le gouverneur britannique voit les choses de son point de vue ( il s'intéresse aux citoyens obéissants et ouverts d'esprit), mais les remarques de Cromer ont-elles quelque chose sur quoi s'appuyer? Saïd n'en dit rien.

La réalité du Moyen-Orient ne l'intéresse pas du tout - seules ses images l'intéressent. Dans l'introduction du livre, il écrit que s'il y avait une réalité qui pouvait ostensiblement être comparée à une image, il la «passerait dessus en silence». A première vue, c'est une décision idéologique, mais il faut se rappeler que Saïd, un spécialiste de la littérature anglaise, dont le contrôle des textes arabes est très limité, n'en savait pas trop sur le Moyen-Orient, certainement beaucoup moins que les «Orientalistes» qu' il condamne. Ainsi, il analyse au scalpel toute expression, représentation ou analyse de l'Orient en Occident, selon un seul critère: à quel point il est «insultant». Selon lui, la plupart des représentations de l'Orient en Occident sont déformées et malveillantes par leur nature même. Cette déconnexion entre réalité et image a créé toute une tradition de recherche qui ne s'intéresse qu'aux images et ne se soucie pas d'examiner à quel point elles reflètent la réalité. Il n'est pas toujours facile de vérifier ce qu'était la «réalité» et les représentations de la «réalité» sont toujours biaisées à un degré ou à un autre. Mais le mépris total du représenté est peut-être le parti pris le plus grave de tous.

Dans la tradition de la littérature «postcoloniale» basée sur Saïd, le terme «orientaliste» est devenu un terme péjoratif qui n'a pas besoin d'être expliqué. Tout chercheur occidental qui s'occupe de l'Orient, qui a précédé Said ou n'accepte pas les prémisses du post-colonialisme, n'est pas un historien mais un «orientaliste». Il n'est pas nécessaire de tester ses affirmations à la lettre. Il a besoin d'être «analysé», car c'est un miroir déformé par définition. Sans surprise, Saïd et ses successeurs en Occident, qui étudient également le Moyen-Orient, ne sont jamais définis comme des «orientalistes». Ce sont des érudits, des personnalités littéraires, des spécialistes de la culture, des historiens, des «intellectuels radicaux». Celui qui s'écarte du bon exemple moral-politique cesse d'être un savant précieux et devient un «orientaliste» - ceux qui n'ont pas besoin d'être écoutés. Cette tradition de silence et de peur, créée par les postcolonialistes à la suite de l' orientalisme , est l'héritage le plus important d'Edward Saïd - et elle doit être démantelée, brique par brique.

Une autre chose particulièrement frappante c'est le deux poids deux mesures de Saïd et de ces disciples. Tout ce que disent les occidentaux doit être déconstruit mais par contre ce que disent les colonisés (en réalité, il s'agit surtout des militants décoloniaux), c'est forcément une vérité absolue (sauf bien sûr, si cela va à l'encontre de ce que pensent les post coloniaux). Ils ont une vision manichéenne digne d'un enfant de 6 ans. Saïd a prétendu que les universitaires occidentaux étaient biaisés contre le monde arabe et islamique et que les universitaires étudiant le Moyen Orient devraient être des arabes eux mêmes. Mais lui même, il n'a eu aucun problème à parler de l'histoire des juifs et d'Israel ainsi que du sionisme alors qu'il était clair qu'il avait un grave parti pris. Si nous suivons sa propre logique selon laquelle toute déclaration critique sur «l'autre» est raciste, Saïd est un antisémite et un raciste anti occidental.  Au final, Saïd était un nationaliste arabe avec une mentalité profondément tribale. Il exigeait de l'Occident qu'il accorde un traitement préférentiel aux arabes. Selon lui, les occidentaux ne devraient pas avoir le droit de critiquer les arabes ou les musulmans mais les arabes eux peuvent critiquer l'Occident ou Israël. Si Saïd était cohérent, les israéliens et les occidentaux pourrait obliger les arabes à ne pas s'exprimer sur Israël et l'Occident. De quel droit Saïd et ses disciples se permettent de parler de l'histoire européenne ou américaine tout en exigeant d'obtenir un monopole sur l'histoire des pays arabes et de l'islam ? Bref, accuser les autres d'être gouverné par leurs stéréotypes quand on est soi même incapable de faire preuve de pensée critique vis à vis de ces propres stéréotypes c'est d'une hypocrisie sans nom. Chez Saïd et ces partisans, les stéréotypes sont mauvais...que quand cela les arrange. En réalité, ils considèrent que tout ce qui va à l'encontre de ce qu'ils pensent c'est un stéréotype raciste. Ils exigent que les autres combattent leurs stéréotypes pour que ces gens acceptent leurs propres stéréotypes comme vérité absolue et incontestable. 

Le principal problème de "l'orientalisme" est son incohérence. Said soutient qu'un Occidental ne peut pas comprendre l'Orient (à moins qu'il ne s'y identifie politiquement), alors qu'il enseigne lui-même l'anglais dans une université américaine ; Il accuse l'Occident d'une attitude essentialiste à l'égard de l'Orient, mais lui-même applique la même attitude à l'Occident ; Il rejette les opposants sur la base du fait qu'ils "insultent" l'Orient, mais lui-même (et ses partisans) n'ont pas hésité à généraliser de manière insultante à l'égard de l'Occident (sans parler d'Israël). Ils insultent le sionisme, l'Occident, Israel mais là il n'y a pas de problème.

Quiconque lit, par exemple, les carnets de voyage de voyageurs et d'érudits musulmans dans l'Inde médiévale, ou de musulmans venus en Europe, voit la condescendance culturelle pas si différente de celle de certains voyageurs occidentaux qui sont venus au Moyen-Orient au XIXe siècle : même sentiment de supériorité religieuse et culturelle, curiosité mêlée de mépris. Mais au lieu de réaliser que les sentiments d'arrogance font partie d'un large éventail de phénomènes qui se produisent lorsqu'une culture en rencontre une autre, Saïd l'a établi comme une pratique de «l'Occident» contre l'Orient.

Saïd, par son ignorance, n'était pas vraiment en mesure de critiquer ou de corriger l'érudition orientaliste sur des erreurs factuelles ou interprétatives spécifiques, et il a donc eu recours à la critique du domaine en tant que discoursC'est-à-dire qu'il s'appuyait sur des arguments conséquentialistes tels que : l'intérêt scientifique pour l'Orient s'est développé en même temps que l'intérêt colonial pour l'Orient, donc l'un a causé l'autre et toute l'érudition est donc entachée ou simplement une expression ou un outil de pouvoir. (C'est l'argument qui a lancé un millier de thèses). Il s'appuie également très fortement sur l'astuce rhétorique par laquelle il qualifie toutes les tentatives de généralisation sur le Moyen-Orient d'"essentialistes". En réalité, toute affirmation énoncée en termes essentialistes peut très bien être vraie en tant que généralisation statistique. C'est le principe même des sciences sociales de dégager des tendances générales. Il est évident que certains individus ne feront pas parti de la norme décrite. (Notons que Saïd, lui même n'hésite pas à essentialiser les occidentaux. Il se montre totalement incohérent)

Il était également coupable d'un autre péché majeur qui afflige les universitaires de littérature anglaise qui ressentent un engagement politique brûlant à écrire sur un sujet social ou politique mais en basant ses recherches principalement sur des œuvres littéraires qu'ils sont déjà enclins à lire de toute façon. Ainsi, le livre de Saïd regorge de discussions sur Flaubert, Nerval, Hugo, Byron, Goethe, Conrad, Kipling et un grand nombre d'auteurs majeurs du XIXe siècle (tout en faisant remonter l'origine de «l'orientalisme» jusqu'aux Perses d'Eschyle!), mais Saïd ne plonge jamais vraiment dans les mauvaises herbes de l'érudition orientaliste réelle (parce que bien sûr,  pour un universitaire en littérature c'est une tâche bien plus ardue). Il ne trace pas non plus de lien entre ces représentations littéraires de l'Orient et leur prétendue utilisation comme justifications de l'impérialisme, ou comme sources de stéréotypes nuisibles sur les Arabes et les musulmans. (Cela nécessiterait de véritables recherches d'archives, un respect plus rigoureux de la chronologie et d'autres scrupules académiques ennuyeux auxquels la littérature anglaise n'a jamais souscrite).

Il y a déjà suffisamment de démontages de Said, il n'est donc pas nécessaire de répéter tous leurs arguments ici. Mais il convient de souligner que le livre de Saïd continue d'être lu et assigné à des programmes car il propose essentiellement un excellent schéma pour tout étudiant diplômé en littérature anglaise qui souhaite : 1. Éviter les recherches originales ; 2. Eviter de se consacrer à un sujet trop intimidant à maîtriser ; 3. Faire avancer sa carrière en insinuant que les doyens existants du domaine ont une approche invalide et désuète et qu'ils sont des racistes conscients ou involontaires ; 4. Vengeance pour un grief ethnique qui n'a qu'une relation très tangentielle avec le sujet d'étude (dans le cas de Saïd, c'était le conflit israélo-palestinien). Et bien sûr, le modèle de Said a imprégné l'étude académique de nombreuses autres régions au-delà du Moyen-Orient: Asie de l'Est, Inde,...

La stupidité de Said c'est de réduire toute théorie à un scénario émotionnel du bien absolu contre le mal absolu. Toute réalité est réduite à un modèle d'oppresseurs et d'opprimés absolus. Tous les autres aspects de la réalité, ceux qui ne s'alignent pas sur la théorie [les préoccupations de sécurité par exemple] sont des excuses, des distractions, des conspirations de pouvoir ou des traumatismes mentaux qui déforment la perception de la réalité. Une telle stupidité ne peut pas relever les défis pratiques, les peurs établies et les difficultés universelles de communication entre différentes cultures. Un autre aspect particulièrement bête de Saïd est la personnalisation. Même s'il est juste de critiquer l'industrie hollywoodienne pour ne pas montrer suffisamment de héros afro-américains (en réalité, c'est surtout les latinos qui sont sous représentés mais c'est un autre sujet), il serait stupide d'accuser un film américain spécifique pour ne pas avoir suffisamment de noirs dans le film (sauf bien sûr, s'il y a des indications que le réalisateur dudit film est raciste).  De la même manière, il est juste de désigner certains groupes sociaux, disons les juifs  Ashkénazes, comme étant statistiquement dans une position privilégiée, autant il est problématique, d'un point de vue moral et empirique, d'en venir à accuser toute personne étant ashkénaze d'être privilégié. Le simple fait qu'une personne soit ashkénaze n'est pas une preuve qu'elle est privilégiéPremièrement, sans connaissance préalable de cette personne, cela peut être un non-sens complet quand on regarde le statut de la personne dans la société avec toutes sortes de paramètres (niveau socio économique,...). Deuxièmement, imposer le fardeau de la structure sociale problématique à une personne spécifique, d'une manière qui confond évidemment l'ambiance de culpabilité et l'état d'esprit de l'analyse sociale froide, n'est pas une ligne de conduite optimale. Pour rappel, Saïd a déclaré: "Il est donc exact que chaque Européen, dans ce qu'il pouvait dire sur l'Orient, était par conséquent un raciste, un impérialiste et presque totalement ethnocentrique."

 Saïd pratiquait allégrement cette personnalisation. Comme certains pays occidentaux ont pratiqué la colonisation, tout occidental est responsable de cette colonisation (même ceux qui n'ont rien à voir avec la colonisation). Le simple fait d'être occidental est une preuve de culpabilité selon Saïd et ses partisans. (Il est marrant de voir à quel point ces gens oublient que la majorité des pays européens n'ont pas eu des colonies. Ils considèrent ces pays comme quand même responsable de la colonisation des autres pays européens. Selon leur logique, un pays comme la Grèce qui a été colonisé par l'Empire Ottoman et n'a jamais eu de colonies en tant que pays européen est quand même responsable de la colonisation). Tout américain est responsable de ce qu'a fait Bush au Moyen Orient. Même ceux qui se sont opposés à la guerre d'Irak et qui n'ont jamais votés pour Bush. Honnêtement, cette mentalité est sidérante et juste totalement raciste. Car c'est bien de cela qu'il s'agit d'un profond racisme anti occidental. Personnellement, si je reconnais que la civilisation occidentale n'est pas parfaite, j'exige que l'on juge les autres civilisations de la même manière.  Car les partisans de Saïd adorent parler des défauts de la civilisation occidentale (souvent, ils en inventent même) mais bizarrement, ils refusent toute critique des autres civilisations. Les autres civilisations relèvent plus d'un fantasme chez l'extrême gauche occidentale. Ils voient l'autre comme dans le mythe du bon sauvage. Ils l'idéalisent dans le but d'attaquer la civilisation occidentale qu'ils détestent tant. Aujourd'hui, dans le monde anglosaxon, les départements des études moyen orientales sont dominés par des arabes (dont une bonne partie de palestiniens) qui ont obtenu leurs postes grâce aux délires de Saïd selon laquelle il fallait donner ces postes à des arabes. (Je ne parle même pas du fait que ces départements sont financés par certains pays du Golfe comme l'Arabie Saoudite et le Qatar). Bien évidemment, ces universitaires arabes ont tout intérêt à pratiquer la victimisation. C'est cela qui leur garantit d'obtenir des postes universitaires et d'obtenir un statut élevé dans la société occidentale progressiste. Ils refusent toute critique de la civilisation arabe mais sont profondément anti occidentaux. Personnellement, je n'ai pas peur de dire que si on compare objectivement la civilisation occidentale à la civilisation arabe, aussi critiquable que soi la civilisation occidentale, elle est bien meilleure que la civilisation arabe (meilleur traitement des minorités, est bien plus avancé scientifiquement et économiquement, démocratie libérale,...). 

Saïd est l'idiot utile du djihadisme et de l'islamisme: https://www.academia.edu/50961854/Orientalism_as_Caliphator_Cognitive_Warfare_Consequences_of_Edward_Sa%C3%AFds_Defense_of_the_Orient L'islamisme se nourrit de la pensée victimaire et anti occidentale de la gauche radicale. Les américains ont retrouvé un livre de Chomsky dans la planque de Ben Laden. 

L'affaire de l'article de Commentary en dit long sur Saïd et ses partisans. Cet article prouve de manière irréfutable que Saïd a menti sur son passé:  https://www.commentary.org/articles/justus-weiner/my-beautiful-old-house-and-other-fabrications-by-edward-said/ Pourtant, ses défenseurs ont violemment attaqué cette article en disant qu'il était malveillant et que l'auteur de l'article était partial. Sauf que cela ne change rien au fond: Saïd a menti sur son passé. Et aucun de ces défenseurs n'a présenté de réfutation sur le fond de cet article. Ils ont lancé de violentes attaques contre l'auteur de l'article. Pire, ils ont présenté Saïd comme la victime. Le pire c'est que Saïd lui même à la suite de cet article, a changé sa biographie dans ses mémoires, Out of Place (donnant raison à l'article de Commentary mais bien sûr, Saïd n'a jamais reconnu qu'il avait menti par le passé. Il a juste changé le récit de sa vie). Cette affaire en dit long sur le rapport qu'ont Saïd et ses défenseurs avec la vérité. Elle leur importe peu. Mentir c'est une chose mais refuser d'admettre que l'on a menti malgré les preuves écrasantes c'est une autre chose. Le plus grand problème n'est pas tant le mensonge en soi mais l'incapacité de Said et de ses partisans d'admettre qu'il a menti. L'incapacité de Said à admettre son tort et à s'excuser est très représentatif du personnage. Même encore aujourd'hui, les défenseurs de Saïd continuent de présenter Saïd comme une victime dans l'affaire de l'article de Commentary (voir Places of Mind de Timothy Brennan qui est un apôtre de Said). La meilleure formule pour décrire Saïd: c'est un réfugié de la vérité: https://jcpa.org/jl/vp422.htm

Bernard Lewis a montré l'absurdité de la pensée de Saïd en utilisant une analogie hypothétique : Supposons qu'un groupe d'intellectuels grecs disent que le monde occidental a privé la Grèce en s'appropriant sa culture et en l'abandonnant politiquement. Par conséquent, ils exigent que désormais quiconque cherche à explorer la Grèce et sa culture soit tenu à l'avance de déclarer son soutien au gouvernement grec, de soutenir la position de la Grèce dans le conflit à Chypre et de haïr les Turcs. Evidemment, cette lecture aurait suscité du ressentiment - pourquoi subordonner tout d'un coup tout un champ de recherche (les études classiques), censé être un patrimoine humain universel, au profit d'un agenda nationaliste ?! Si oui, pourquoi une lecture similaire est-elle la bienvenue lorsqu'elle vient du Moyen-Orient ? L'un des problème de "l'orientalisme" est le problème de la non réfutation: après tout, quiconque conteste l'orientalisme devient nécessairement lui-même orientaliste ce qui prouve ainsi la théorie. 

Un problème qui caractérise généralement la pensée postmoderne c'est que ce groupe se concentre sur l'analyse stérile, bien que parfois - je l'avoue - mentalement stimulante, sur les représentations, les symboles, les préjugés, les interprétations, etc. Il ne traite jamais de l'essence parce qu'au fond (habituellement consciemment et parfois inconsciemment) il ne reconnaît pas son existence. Selon eux, il n'y a pas de réalité, pas de vérité, donc ils se concentrent toujours sur la personne et non sur ses idées, ses décisions ou ses actions. En fait, ces écrivains menacent (et ciblent parfois consciemment) tous les domaines de la connaissance humaine.

Le cas Edward Saïd soulève un autre problème: cette industrie absurde est rejointe par une culture non occidentale, qui ne considère pas la recherche académique, la vérité ou l'équité comme des valeurs en soi mais comme des instruments. Lorsque ces deux-là se rejoignent, les connexions deviennent particulièrement mauvaises et dangereuse. La vérité, l'équité, la raison et l'opinion sont des valeurs fondamentales, voire des valeurs constitutives de la culture occidentale (pour autant qu'on puisse parler d'une culture occidentale unifiée). Ainsi, par exemple, il est difficile d'affirmer que ce ne sont pas les valeurs fondamentales en Grande-Bretagne de John Stuart Mill ou d'Edward Cook. En revanche il est tout à fait clair qu'elles n'ont pas été élevées à un tel rang dans la Russie stalinienne ou dans la Palestine arabe. Plus important encore, ce sont certainement les valeurs fondatrices des milieux académiques occidentaux aujourd'hui mais elles sont menacés par la gauche radicale occidentale qui veut détruire l'Occident. Le monde arabe, par sa culture de l'honneur accorde bien moins d'importance à la vérité que la civilisation occidentale. Les militants de gauche radicale veulent changer la culture universitaire occidentale pour soumettre le monde universitaire à leur idéologie. Or, si vous faites entrer dans le monde universitaire occidentale, des universitaires arabes qui n'ont pas cette culture de la vérité cela ne peut que nuire au monde universitaire. (Attention, je ne prétends nullement que tout universitaire arabe n'a pas cette culture de vérité. Il y a des universitaires arabes qui se sont appropriés la culture occidentale de la vérité). Simplement quand vous regardez à l'échelle collectif, le remplacement d'universitaires occidentaux par des universitaires d'autres cultures où la vérité a moins d'importance peut avoir un grand impact sur la culture universitaire.

L'idée fondamentale que seuls les personnes appartenant au groupe concerné peut étudier l'histoire du groupe est vraiment délirante. Au contraire, avoir un regard extérieur peut être très utile. Un regard extérieur peut être bien plus neutre qu'un regard intérieur. Au final, ces gens (gender studies, african studies,....) créent des groupes fermés qui ne parlent que dans leurs "espaces de résonance" intérieurs et sont complètement détachés du monde qui les entoure, une sorte de chœur de râleurs grincheux qui n'essaient même pas de créer un dialogue. Un autre exemple: jusqu'à relativement récemment, la plupart des érudits du Talmud, étaient des juifs religieux. Ce n'est que récemment (relativement) que des non-juifs ont commencé à entrer sur le terrain, cela a provoqué des changements radicaux et fascinants dans la compréhension de l'histoire juive. Par exemple, pendant de nombreuses années, l'hypothèse naturelle des érudits religieux étaient que les rabbins mentionnés dans le Talmud étaient les "grands hommes de la génération" et les "chefs du peuple" de cette époque. Ce n'est que lorsque des érudits non juifs ou non religieux sont entrés sur le terrain qu'ils ont commencé à examiner les découvertes archéologiques des murs de la synagogue (par exemple) et ont constaté que des rabbins qui n'apparaissent pas dans la Guemara sont mentionnés à maintes reprises, tandis que certains rabbins qui apparaissent dans la Guemara ne sont pas mentionnés. Ils en ont conclu que la Guemara était loin d'être la seule et même la plus fiable source sur l'histoire du peuple d'Israël à cette époque.